Déjà la guitare claque bien. Son vernis Faded Pelham Blue lui va à ravir et se marie superbement avec les chromes omniprésents sur la bête. On sait que Ray Dietrich le designer de la Firebird travaillait chez General Motors, dans cette livrée et avec cet accastillage, on a vraiment affaire à une belle américaine, extravagante et classieuse à la fois.
Du traditionnel mais pas que
Côté structure, Gibson a conservé le manche conducteur avec deux ailes en acajou pour le corps, mais la marque a voulu renforcer ce manche qui compte neuf sections d’acajou et de noyer, alors qu’il est tout acajou d’habitude. De même exit, les mécaniques de banjo (ou les Steinberger plus récentes). Du coup, la tête a été simplifiée afin d’accueillir les mini Grover. Exit donc les rainures et différences de niveau. On a une tête toute plate et toute noire. C’est un peu dommage de perdre le côté matching color qu’apportait la tête originale, mais on comprend le souci de proposer quelque chose de plus standard en matière de mécaniques. Sans que cela soit un vrai défaut, car ça ne nuit ni à la jouabilité ni à la tenue de l’accord, on peut remarquer que les mécaniques ne sont pas idéalement réparties sur la tête, ce qui fait que les cordes ne sont pas totalement droites dans le prolongement du sillet. Mieux vaudra par ailleurs avoir des doigts fins car les têtes des mini Grover sont à la fois petites et rapprochées.
Le profil du manche déroute un peu au début parce qu’il n’est pas aussi rond et fat que d’habitude. Mais on s’y habitue rapidement et on se sent assez vite à l’aise. La touche, en palissandre compte 22 frettes, est entourée d’un binding et ornée de repères trapézoïdaux. La guitare est plutôt agréable à jouer, ne fatigue pas la main, l’action est suffisamment basse mais pas trop, les tirés sont faciles et les aigus ultra accessibles. Les attaches de sangle ont été déplacées par rapport au modèle original, et c’est loin de n’être qu’un détail. Celle du bas, traditionnellement placée au milieu du corps a été légèrement remontée. Ce déplacement vers le haut, pratiqué par Hamer sur ses Standard par exemple, positionne le corps différemment avec plus de masse sous l’attache qu’au-dessus ce qui participe à rééquilibrer l’ensemble de la guitare en position debout. L’attache côté manche est fixée derrière le talon et non plus sur la tranche du corps, rendant la guitare beaucoup plus joueuse et autorisant de positionner le manche plus ou moins haut suivant la difficulté technique de ce qu’on est en train de jouer. Cela plus les mini Grovers, plus légères, efface le reproche qu’on fait souvent à la Firebird de piquer du nez. Elle tient impeccablement en place quelle que soit la position de jeu qu’on adopte. C’est vraiment un plus.
Passons au Vibrola : ceux qui connaissent ce vibrato savent qu’il ne doit être manipulé qu’avec une extrême douceur pour des variations légères sous peine de désaccordage. Sur cette guitare, si on s’en tient à cet usage subtil, on n’aura aucun problème de tenue d’accord, c’est un très bon point. Esthétiquement, avec son prolongement orné d’une lyre, c’est la grande classe. A vide, la guitare résonne bien, elle a un son acoustique agréable à l’oreille avec de l’attaque et une certaine profondeur.
On branche !
L’électronique est, finalement, ce qu’il y a de plus classique dans cette Firebird : deux mini humbuckers routés via deux volumes et deux tonalités, justement comme on l’on aime quoi. Là encore, un petit reproche : les micros ont l’air d’être montés à l’envers, car normalement le haut de leur capot devrait être parallèle aux cordes, c’est-à-dire plus haut vers le chevalet que vers le manche et c’est juste le contraire qui se passe. Cela étant, ils ne sont peut-être pas monté à l’envers, mais, du coup, ils le devraient. Je vous ai perdus là hein ?
Le tout donne les résultats attendus. En son clair, on est tour à tour ravi de la rondeur des basses et de la profondeur du son sur micro grave, de la niaque et de la brillance du micro aigu, et du mélange parfait des deux en position intermédiaire. En son crunch, on se sent bluesy à donf que ce soit sur le micro grave, à la fois grumeleux et précis (les mini humbuckers savent le faire) ou sur le micro aigu qui flirte assez vite avec la saturation, à moins de baisser un poil le volume sur la guitare. Rien qu’avec les sons clairs et crunchs, on enquille les Stones, Free et consorts ainsi que le très regretté Johnny Winter bien sûr. Puis on passe dans le franc saturax, et là faut tenir la bête : ça rugit, c’est épais et brillant, serré et tranchant quand on « palm mute » et ça s’ouvre avec bonheur, tous chromes dehors, dès qu’on lâche du power chord ou des accords plein de cordes à vide qui résonnent à l’envi. Pas de doute, la Firebird reste une arme de choix, à la personnalité affirmée.
Les petits changements apportés à cette Limited Edition sont pour la grande majorité d’entre eux positifs, aidant le guitariste à dompter cette bête sauvage sans y sacrifier son caractère, même si la tête perso… Bref, une Firebird qui le vaut bien.