Généralités
Afin de bien comprendre ce qui va suivre, il est impératif de réaliser qu’une lampe est un assemblage de composants, logés dans un tube de verre à l’intérieur duquel le vide a été fait, comme dans une ampoule électrique et pour la même raison : éviter que les composants ne brûlent (pas d’air, pas de combustion). Or, vous avez déjà remarqué qu’une ampoule électrique dure un temps variable, certaines claquant au premier allumage, d’autres, du même modèle paraissant increvables. De même, nul ne peut connaître à priori le niveau de performances et la tenue dans le temps d’une lampe. Tout ce qu’on peut faire c’est rassembler un maximum d’atouts (qualité des composants, sérieux de l’assemblage etc.) lors de la fabrication et ensuite tester la lampe pour mesurer ses performances.
Un quartet d’EL34 au travail
Deuxième problème, le secteur n’est plus assez rentable depuis que les transistors ont remplacé les lampes dans presque tous les domaines. Les seuls fabricants encore en lice sont à l’est (Russie, République Tchèque etc.) et en Chine. La conjugaison de ces deux facteurs explique que les marques les plus cotées actuellement soient, pour la plupart, des "testeurs" et non des fabricants. C’est le cas d’une des plus connues : Groove Tubes. GT achète ses lampes chez des fabricants ou rachète de vieux stocks (militaires ou autres), puis passe ces lampes sur un banc d’essai informatisé pour mesurer leurs performances et les appairer (voir puissance). On se trouve donc dans une position paradoxale, puisque les fabricants ne vendent pas forcément en propre le meilleur de leur production.
Préamplification
Diverses lampes de préamp, toutes développées sur
la même base : une double triode
Cette section, dont le rôle est de sculpter et de gonfler suffisamment le signal pour qu’il puisse attaquer la partie puissance dans les meilleures conditions se voit trop souvent négligée par les guitaristes. Quel que soit le nombre de lampes que compte le préamp de votre ampli, chacune a un rôle propre : amplifier le signal en entrée, attaquer l’égalisation ou la reverb ou le trémolo, gonfler le signal en sortie de boucle d’effet, etc.
Or si l’on voit souvent des gratteux débattre à n’en plus finir sur les qualités et les défauts de telles ou telles lampes de puissance, peu se soucient de ces lampes de préamp et c’est un tort. Prenons par exemple la lampe d’entrée (elle se trouve bien souvent au plus près de l’entrée jack) : c’est la première à prendre votre signal en charge, elle a par conséquent un énorme influence sur le grain et la couleur de votre son et mérite autant d’attention que les lampes de puissance. En effet, à quoi sert de changer ces dernières si la lampe qui est au début de la chaîne est asthmatique et grève dès le départ les performances de l’ampli ? Cela veut dire aussi que votre son ne sera pas le même suivant que vous employez une ECC83 une 12AX7 ou une 7025 à ce poste et qu’il n’est pas anodin de choisir telle ou telle marque. J’ai pu moi-même constater sur mon ampli qu’une ECC83 en entrée donnait de meilleurs résultats en terme de musicalité qu’une 7025 pourtant supérieure en performances sur le papier. Sur un autre ampli et suivant les goûts de son utilisateur, le contraire sera peut-être vrai. C’est pourquoi il faut essayer différentes choses, mais on ne le répétera jamais assez, sous l’oeil d’un spécialiste.
Puissance
Bien que ce soient toutes des EL34, leurs différences
physiques se retrouvent à l’écoute
En matière de puissance, il existe différentes architectures. Chacune est plus ou moins rattachée (à tort ou à raison d’ailleurs) à la marque qui l’a rendue célèbre dans notre microcosme : Marshall/EL34, Vox/EL84, Fender/Boogie/6L6/5881 etc. Leur caractéristiques physiques, taille des composants, volume du globe de verre, font que même à puissance sensiblement égale, elles ne travaillent pas toutes dans les mêmes conditions. Cela se retrouve bien sûr à l’arrivée : l’EL34 par exemple distord plus tôt qu’une 6550. Mieux encore, deux lampes de même modèle peuvent donner des résultats assez différents suivant la forme de leur globe de verre, ou la qualité des composants qu’elles intègrent.
Une 5881, une EL34 et une 6V6
De plus, contrairement aux lampes de préamplification qui ont chacune un rôle particulier dans le circuit d’amplification, les lampes de puissance travaillent par équipes de deux, quatre ou six. C’est pourquoi il convient de les changer toutes même s’il n’y en a qu’une qui pose problème car les performances de l’équipe sont toujours réduites au maillon le plus faible. Cela explique qu’il vaille mieux opter pour des duet ou quartet ou sextet de lampes appairées. Ce terme indique que les lampes ont été testées, et qu’on les a groupées selon leurs performances, comme une équipe de coureurs dont on serait sûr qu’il courent tous le 100 mètres à la même vitesse. Là encore, le choix d’un grade (classification utilisée par chaque fabricant) n’a rien d’innocent. A même type et même provenance des lampes, la différence en termes de son, entre le grade le plus faible et le plus fort est importante. Là encore, selon vos goûts et votre ampli les grades les plus forts ne seront pas forcément les plus musicaux ou les plus adaptés à vos besoins. Eh oui, il faut là aussi procéder à des essais.
Enfin, il n’est pas idiot non plus, lorsqu’on investit plusieurs centaines de francs dans un changement de lampes de puissance de vérifier l’état de la lampe déphaseuse (12AU7 en général, située la plupart du temps au plus près des lampes de puissance) puisque c’est elle qui contrôle le flux électrique qui arrive aux dites lampes.
Vous l’avez compris, il n’y a pas vraiment de lampe insignifiante dans un ampli. Toutes, à plus ou moins grande échelle concourent à faire de votre son ce qu’il est. Je ne peux, faute de place, entrer plus dans le détail, mais j’espère avoir attiré votre attention sur des aspects de votre son qui me semblent au moins aussi importants (sinon plus) que votre marque de guitare et votre type de micro préférés.
Merci à Fred de Valve House Music pour ses conseils.