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Jerry Cantrell

Nouveau départ

D 20 octobre 2009     H 19:24     A Judge Fredd    


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Ca y est ! Black Gives Way To Blue, le nouvel opus d’Alice In Chains est sorti ! Et c’est un bon crû ! C’est donc avec un certain plaisir, malheureusement soigneusement minuté par le staff du label américain, que nous avons pu nous entretenir avec Jerry Cantrell, artificier en chef du band de Seattle.

Les albums ayant suscité autant d’attentes, se comptent sur les doigts d’une main. Il aura fallu patienter presque quatorze ans pour entendre à nouveau ce mélange de gros riffs entêtants, de magnifiques guitares acoustiques, d’ambiances à la fois sombres, mélodiques, puissantes, de parties vocales hypnotiques, tour à tour déchirantes et éclatantes, adossés à une section rythmique massive et inventive, mélange constituant la marque de fabrique d’un groupe qui a su s’imposer bien au-delà du courant musical dont il est issu.

Alice in Chains

Loin des reformations business artificielles, celle d’Alice In Chains est venue tranquillement, étape après étape, et s’est fortifiée dans le temps, avant que le groupe n’entre en studio. On se souvient qu’Alice s’était arrêté en 1996, sans qu’il y ait vraiment séparation, alors que deux de leurs albums trustaient les premières places des charts aux USA. Puis, jusqu’à la mort de Lane Staley en 2002, le groupe n’a enregistré que quatre nouveaux titres, Cantrell sortant parallèlement deux albums solos. Silence radio jusqu’en 2005, où les trois membres restant se réunissent (avec Pat Lachman de Damage Plan) pour un concert au profit des victimes du tsunami. Le deuxième pas décisif vers la reformation se fera lors d’un concert pour la chaîne VH1 avec William Duval. Celui-ci avait tourné avec Cantrell lors des tournées suivant les albums solo. De là vient l’idée de monter une tournée avec, notamment, pas mal de dates en Europe dans des festivals, histoire de se faire la main loin des Etats-Unis peut-être. La scène ayant validé le nouvel Alice In Chains, il ne restait plus qu’à en imprimer la trace, ce qui fut fait sous la direction de Nick Raskulinecz et avec la complicité de Dave Grohl.

Dès lors que vous avez annoncé la mise en route de ce nouvel album, on a vu un déchaînements de passions sur internet, avec pas mal de gens disant que Lane Staley ne pourrait jamais être remplacé que cet album n’était pas une bonne idée etc. Comment avez-vous reçu tout ça ?

Bien sûr que Lane ne pourra jamais être remplacé et ce n’est absolument pas ce que nous cherchions à faire. Vu la situation dans laquelle nous nous trouvions, nous nous sommes juste appliqués à aller de l’avant et à ajouter une pièce à l’héritage, à l’existant. De plus, dans ma vie, si j’avais du ne faire que ce que les gens voulaient que je fasse, je ne serais même pas musicien, j’aurais fini avocat ou docteur (il se marre). Effectivement, on a eu la chance d’être une bande de potes, d’avoir eu une belle vie, pendant laquelle nous avons créé quelque chose qui parle toujours à beaucoup de gens, on en a la preuve tous les jours en tournée. Cela dit, on a évolué, par la force des choses et on ne cherche absolument pas à retrouver ou recréer le passé.

William Duval ressentait-il tout de même une certaine pression ?

Bon t’as écouté l’album, t’as senti de la pression toi ? Je comprends les réserves de certains fans mais, en fin de compte, nous avons vécu cette vie, nous avons créé cette musique, nous avons enterré notre meilleur ami. C’est à nous que tout cela est arrivé, pas aux autres, et le fait d’avoir eu à affronter des challenges quasi impossibles, et d’en sortir avec cet album, tout en étant respectueux non seulement de Lane mais aussi de nous-mêmes, parle de lui-même. It’s a cool story man !

On retrouve la signature vocale d’Alice In Chains avec des parties de chant doublées à la quarte ou à la quinte...

Oui ça découle aussi de la musique des accords que nous aimons employer, c’est un mélange, donc ça ne peut pas vraiment sonner autrement. C’est un truc qu’on a créé ensemble Lane et moi, en équipe... Alors, bien sûr, il avait un talent que j’aurais bien aimé avoir moi-même, la façon de chanter, ce qu’il y insufflait... Mais il m’a donné confiance dans mes talents de chanteur, j’ai chanté de plus en plus et c’est une des choses qui me restent de lui, c’est à la fois un cadeau et une chose que nous avons créé ensemble. Avec William, bien que la relation soit différente puisque ce sont des deux personnes totalement différentes, on a fonctionné de manière similaire.

Black Give Way To blue

L’album rappelle aussi pas mal votre travail solo.

C’est la même chose, tu sais je pense que mon travail solo sonne pas mal comme du Alice, tout simplement parce que c’est la façon dont je joue, dont je compose. Alors, en gros, ce qui différait dans mon travail en solo venait surtout des autres musiciens avec qui j’ai enregistré. Et, pour en revenir à Black Gives Way To Blue, le fait d’avoir retrouvé Sean Kinney et Mike Inez, le raccroche plus, à mon sens, à l’ensemble du travail d’Alice In Chains qu’à mon seul travail en solo.

Vos paroles et vos ambiances musicales sont toujours assez noires, assez desespérées...

Merci ! (il est mort de rire)

D’où vient que vous ne faites jamais un titre qui dise : « Super ! Il fait beau, allons faire du surf avec de jolies filles ! » ?

Il y a toutes sortes de manières d’exprimer des émotions, j’ai choisi ou j’ai toujours été plus inspiré par une musique qui exprime des choses intérieures, un peu plus sombres, un peu plus profondes, un peu de « l’autre monde » si on veut. C’est quelque chose qui m’a toujours attiré même avant de faire de la musique. Du coup, encore une fois, c’est un style particulier, une façon de composer personnelle qui s’est développée au long de toutes ces années : « It’s just the way it is man »... Et j’en suis fier. Et puis j’vais te dire, si c’est une belle journée ensoleillée, que je me sens bien, que tout baigne, je vais pas chercher à composer quoi que ce soit, je préfère aller prendre du bon temps, aller en mer pêcher avec mes potes, cruiser le long de la côte. (rires)

L’apport de William à la guitare ?

C’est cool d’avoir ce côté polyvalent. Après nos deux premiers disques, et parallèlement à mon apprentissage du chant, Lane avait commencé, lui aussi, à jouer de la guitare, car il voulait être capable de composer à la gratte. Il a d’ailleurs écrit des titres vraiment cools : Angry Chair, Hate To Feel, Head Creeps ainsi que pas mal de trucs sur l’album de Mad Season (supergroupe qui réunissait entre autres Lane Staley, Mark Lanegan et Mike Mc Cready). William nous apporte aussi cette polyvalence, c’est un grand chanteur, un excellent guitariste et le plus important pour moi c’est qu’il est passionné, il travaille très dur, il aime ça. Il écrit la plupart des lyrics, il chante, joue de la guitare et il tient la scène. Nous sommes des guitaristes très différents, mais nous évoluons en équipe, avec William, Mike et Sean. William a été et est un élément crucial au service de notre volonté commune d’aller de l’avant.

Alice In Chains

Vous êtes connu pour vos sons de guitare bien puissants, comment vous y prenez-vous ?

Il y a tellement d’aspects dans la définition du son de guitare... J’expérimente beaucoup, j’essaie des tas de guitares et des tas d’amplis pour essayer de trouver à chaque fois, le son qui convient à telle ou telle chanson. Mais il y a une espèce de « noyau dur » auquel je reviens toujours, constitué par la G&L Rampage et la Gibson Les Paul. Il y a beaucoup d’autres guitares dans le disque mais celles-là sont les principales. Pour ce qui est des amplis je suis un gros utilisateur de Bogner, et j’ai fait pas mal de combinaisons, préampli Bogner Fish, amplis Shiva, Ubershall, là je suis revenu au Shiva ces derniers temps. J’aime bien utiliser des haut parleurs vintage et je crois que là j’ai utilisé principalement des baffles Marshall avec des Celestion 30W.

A ce stade, la liaison téléphonique devient assez exécrable et alors que je lui pose une question sur son background acoustique en citant Zakk Wylde et Ty Tabor comme autres gros riffeurs ayant une solide formation folk rock acoustique, il comprend que je lui demande qui sont ses guitar heroes. Le temps d’interview touchant à sa fin je décide de le laisser continuer...

Zakk est une force de la nature, Ty est incroyable, j’adore King’s X et j’adore son boulot à la guitare. Mais mes plus grands heroes sont Tommi Iommi pour le côté lourd et sombre de son jeu, Jimmy Page parce c’est également un style unique, David Gilmour, Jimi Hendrix, Angus et Malcom Young... Je pourrais continuer longtemps comme ça (rires)...

Voix nasillarde de l’attachée de presse ricaine : « Ok Judge, thank you very much. I’m sorry but we have another interview so... » 

Au revoir alors...

Au revoir, on se voit en octobre. Nous serons en Europe.

 

Mots-Clefs

Type d’article
Interview
Musiciens/Groupes
Alice in Chains Jerry Cantrell
Numéro
GX35

 

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