Cette fois monsieur Mignot s’est attaqué à une électroacoustique mais, histoire de ne pas s’ennuyer, il l’a équipée d’une table en... inox !, d’un millimètre et demi d’épaisseur. Je sens les intégristes qui tiquent et ne vont pas tarder à tourner la page. Ben salut les mecs et tant pis pour vous, vous ratez quelque chose. Car nous ne sommes pas ici en présence d’un gadget débile ou d’un caprice mal maîtrisé, mais bel et bien d’une super guitare.
Faisons le tour des matériaux pour avoir une idée de l’exigence qui a présidé à la fabrication de cet instrument : dos et éclisses sont en douka ondé, bois africain exotique, avec un binding en érable ceignant le dos ; le manche en érable ondé est surmonté d’une crosse en douka qui recoit une plaque en inox de la même épaisseur que la table. Ce système, inauguré par Groove tubes, repris par James Trussard, augmente le sustain général de l’instrument. La touche est en amarante, bois qui s’oxyde à l’air prenant souvent une belle couleur violette qui avec le temps évolue parfois vers le marron. Près du cordier Shaller, on aperçoit le chevalet, lui aussi en érable et douka ondé massif. Son sillet est en ivoire tandis que le sillet de tête adopte l’inox. Pour les passionnés, précisons qu’on ne trouve aucun barrage sous la table en inox, juste un renfort de bois dans lequel sont fichés deux inserts pour visser le chevalet. La table est donc nécessairement percée à cet endroit. On remarque également une inclinaison du corps, qui a une épaisseur de 60 mm à l’arrière pour 45 mm côté manche.
Ce dernier est collé, ce qui favorise aussi la circulation des vibrations. Sans être branchée l’Halloween a déjà du coffre. Son son très doux, très moelleux (ce qui n’empêche pas de belles attaques) tire légèrement vers le dobro (table oblige) tout en restant celui d’une guitare. Elle est agréable à jouer et confortable grâce à son manche bien profilé. Son amplification est assurée par un piezo modèle B-Band avec préampli Core 99 d’EMF Acoustics, on ne trouve aucun volume ou réglage d’égalisation sur l’instrument : le signal sort par le bouton d’attache bandoulière à l’arrière de la caisse, just plug it in ! Le système peut se démonter très aisément (4 vis) donnant alors accès à 4 switches jouant sur les fréquences pour s’approcher du rendu d’une jumbo ou autre. Lors de l’essai, la guitare était montée en cordes électriques, ce qui la rendait très (trop ?) facile à jouer mais l’handicapait un peu sur le strict plan acoustique. Malgré cela, l’Halloween a fait preuve d’une étonnante clarté mâtinée de douceur dans les attaques, d’une profondeur intéressante et s’est avérée très musicale, toutes qualités qui devraient être encore plus marquées avec des cordes bronze.
Encore une fois Emmanuel Mignot innove, techniquement et eshétiquement tout en préservant la chaleur et la musicalité qu’on attend d’un tel instrument. L’Halloween vaut qu’on s’intéresse à elle ne serait-ce que pour ne pas mourir idiot.