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Eric Gales/Dug Pinnick

Graines et soda

D 23 février 2013     H 16:12     A Judge Fredd    


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Eric Gales un des guitaristes les plus mal connus par chez nous, Dug Pinnick bassiste du légendaire King’sX et Thomas Pridgen batteur survolté de Mars Volta se sont unis pour nous concocter un album baptisé tout simplement « Pinnick Gales Pridgen ». Ca c’est déjà énorme. Mais en plus devinez quoi, on les a interviewés, enfin deux d’entre eux.

Lobby du Sheraton, le Judge, un peu en avance, s’installe tranquille pour interviewer deux des types qu’il écoute depuis de nombreuses années et qu’il n’aurait jamais imaginé avoir ensemble en face de lui. C’est le matin. Arrive un grand type, jogging et chaînes en or, hip hop style quoi, un gros sac de… graines (!) et une boisson à la couleur improbable dans les mains. Eh ouais, eh ouais, c’est Eric Gales et son p’tit déj’, wow ! Il écrase un des fauteuils avec satisfaction et, comme Dug Pinnick est à la bourre, on commence sans lui. Tout au long de l’interview, Gales bouffe des graines par poignées, ce qui a pour effet de rendre ce qu’il dit relativement inintelligible et de l’obliger à prendre de grandes rasades de breuvage coloré pour faire passer le tout. Le personnage est à la fois chaleureux, sympathique et désarçonnant, à tel point que, quand je lui demande de se présenter, je ne sais pas s’il se fout gentiment de ma tronche ou s’il s’applique à bien répondre.

Bonjour, je m’appelle Eric Gales de l’Eric Gales Band, je joue de la guitare (il se marre), je viens du Tennessee, je vis en Caroline du Nord et ça fait 34 ans que je fais ce métier.

Comment est venue l’idée de ce projet avec Dug Pinnick et Thomas Pridgen ?

EG Mike… eeerrr…. (graines alerte -> rasade de soda) c’est Mike Varney le producteur avec qui je travaille (Schrapnel Records NDR) qui, depuis un moment, me poussait à faire un truc genre super groupe, il avait envie de produire quelque chose comme ça. Je réfléchissais avec qui le faire et King’s X étant probablement le meilleur groupe pour qui j’aie jamais ouvert... Ce groupe est juste énorme, je suis un grand fan. Et il s’est trouvé qu’en plus je me suis super bien entendu avec eux quand on trainait ensemble. Et, man ! La rencontre (musicale) avec Dug, ça a fonctionné direct, j’aurais pas pensé que ça serait aussi facile et intense à la fois.

Et Thomas Pridgen ?

EG Il avait déjà joué sur mon disque The Psychedelic Underground.

Après la première surprise je me suis rappelé de certaines chansons de l’Eric Gales Band sur lesquelles il y a un côté très King’s X…

EG Oh oui, complètement ils m’ont pas mal inspiré sur une certaine période.

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Avec ce trio, il n’y avait pas de volonté de faire un combo black ?

EG Non, non, aaaarrrrh…. (graines alerte -> rasade de soda) le line up s’est mis en place uniquement sur des critères musicaux , il se trouve qu’on est tous noirs, bon c’est comme ça mais ce n’est pas voulu.

Et c’est un one shot ou le groupe va perdurer ?

EG Ca va durer on a déjà prévu d’enregistrer un second album en avril ou en mai.

Oh et vous avez déjà les morceaux pour ce deuxième disque ?

EG Ca ira vite, ça ira vite. (Il sourit).

Et vous allez tourner avec ce band ?

EG Oui c’est déjà en préparation… aux states pour l’instant reuuuh… (graines alerte -> rasade de soda) mais on va aussi tourner à l’international. On est tous les trois super chauds à cette idée.

Et vos groupes respectifs ils deviennent quoi ?

EG Ils continuent bien sûr, Eric Gales Band, Lauryn Hill avec qui je joue aussi ainsi que le Hendrix Tour qui… Dug ! Hey Dug ! What’s up Man !!!

Arrivée de Dug Pinnick super tranquille, qui s’excuse de son retard. Passage en revue de toutes les sortes de poignées de main que permet l’anatomie humaine, hugs en série, gros rires et on enquille. Autant Gales est physiquement imposant, autant Pinnick, qui fait à peine la moitié de l’autre, impose le respect rien que par sa façon bienveillante d’embrasser du regard tout ce qui l’entoure. Le Judge se sent bien là entre ces deux bonshommes. Pas déçu du voyage…

On parlait du fait que vos groupes respectifs continuaient. King’s X ?

Dug Pinnick On est un peu en standby actuellement parce que Jerry (Gaskill, le batteur NDR) a eu une attaque cardiaque…

EG Ouh... Man !..

DP Oui et il a aussi perdu sa maison dans les derniers ouragans

EG Oh Man ! Wow !

DP Et en plus il s’est marié, donc il est mort, sa maison est engloutie et il est marié, mais il a résisté et il va bien (sourire).

EG Wow, wow, wow, Man !

J’ai cru reconnaître vos pattes respectives sur certains titres de l’album, Collateral Damage ou Hang On Big Brother sonnent très Gales et d’autres comme Wishing Well, Hate Crime, font très Pinnick. Comment avez-vous composé les morceaux ?

DP Je suis arrivé avec cinq titres, Mike Varney en a écrit deux, Thomas, un, et Eric a écrit le reste.

EG Voilà l’histoire man, on a tout mis sur la table, chacun a écouté ce que les autres proposaient et on a commencé à y mettre nos trucs ; chacun s’est approprié les parties, y a mis de son style. On a pas mal échangé genre « Tu penses pas que ce truc devrait plutôt être dans le refrain ? » ou « Tiens j’ai trouvé ça t’en penses quoi ? ». Simple quoi, chacun a participé au truc à sa manière avec sa personnalité. oooorrrrrr… (je m’disais aussi ça pouvait pas durer, soda Eric ? ;-)

DP Exact, le truc c’était « Fais comme tu fais, fais comme tu es. » On ne voulait pas que l’un de nous ne se sente pas bien donc la consigne c’était : t’as une idée, vas-y fais on verra après. Fonce, après tout c’est ce que les gens veulent entendre.

En terme de jeu, vos trois styles se mélangent vraiment bien. Plus qu’en terme de compos je trouve. Pour le second album vous pensez composer plus tous les trois ensemble.

DP On n’en a pas encore discuté vraiment. Mon souhait est qu’on arrive le plus frais possible et qu’on enregistre et qu’on voie ce que ça donne. Mais peut-être que ça ne se passera pas comme ça à cause de nos emplois du temps bien chargés à tous les trois.

EG On verra bien

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Thomas Pridgen est un batteur impressionnant et atypique. Cela a-t-il changé…

DP Non, on lui a dit de ne rien changer.

EG Mmm… il a fini par changer…

Mais pour vous, dans votre jeu, ça a changé quelque chose ?

DP c’était un peu difficile parce que je ne suis pas habitué à jouer avec des batteurs qui tapent autant de coups à la seconde, et je sais que sur certains passages quand on jouera live, il faudra que je me concentre.

EG Ho, ho, ho ! Man… Je ne te crois pas.

DP Si je t’assure, le bassiste de Mars Volta dit la même chose d’ailleurs, les guitaristes ça vous perturbe moins parce que vous avez-ce truc de la quadruple croche là, mais moi je ne suis qu’un simple bassiste, mesure à 4 temps : one, two, three, four, alors quand il part à fond, genre (onomatopée intranscriptible façon roulement de caisse claire qui passe ensuite sur chaque tom), je me dis oooooh repère le 1 Dug, vite ! (Rires)

Qui a écrit Angels and Aliens le premier single du disque.

DP C’est Mike Varney. Il a aussi écrit les paroles à partir d’une discussion qu’on avait eue tous ensemble sur les anges et toutes ces sortes de choses.

Je me disais bien que ce n’était pas un titre d’un de vous deux…

EG C’est sûr, ça fait un peu trop publicité pour le Texas !

Là les deux sont pétés de rire, un truc m’échappe mais s’ils sont contents, moi aussi. Ca sent la private.

On passe à Jasmine, instrumental à la guitare version moderne de la lettre à Elise. D’où ça vient, qui est Jasmine ?

EG C’est ma fille. C’est un truc que je joue en live et je le laisse sortir comme ça vient, du fond de mon cœur. Mike m’a demandé de l’enregistrer parce qu’il trouve que c’est un truc qui parle à tout le monde. Ca fait comme un interlude sur l’album.

Elle a quel âge ?

EG 20 ans

DP Wow !

Et qu’est-ce qu’elle pense d’avoir un titre qui lui est dédié sur le disque ?

EG Elle ne le sait pas encore.

Qui a eu l’idée de reprendre Sunshine Of Your Love ?

DP Ah ça c’est Eric

EG Wow, wow, wow, moi j’ai juste eu l’idée de faire une reprise, point barre ! Donc on s’est dit ok mais quelle chanson on reprend ? On est passé par plein de trucs, un titre de Led Zeppelin, ou d’Hendrix, mais ça c’était un peu trop évident avec mon jeu de guitare et nos voix, alors on a évoqué Deep Purple aussi et on a finit sur Sunshine Of Your Love. D’ailleurs on en faisait une version avec mon frère dans Eric Gales Band et déjà on avait descendu la tonalité pour mettre du gras là-dedans.

Tiens d’ailleurs votre frère Eugene ? Que devient-il ?

EG Il s’occupe et profite de sa famille, il continue à jouer. Pour l’instant il garde ça pour lui mais je pense qu’il reviendra sur le devant de la scène tôt ou tard.

Pour revenir à Sunshine, c’est intéressant la manière très hachée très moderne que vous avez de jouer le riff, à l’inverse de ce qui se faisait à l’époque où les notes pouvaient traîner un peu et les silences être un peu bruyants, avec vous c’est sharp.

EG Oui c’est bien de mettre son empreinte, même toute petite, sur un morceau plutôt que de le reprendre tel quel.

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Eric vous jouez dans un style très hendrixien, le fait d’être gaucher vous a-t-il orienté plus vers Hendrix ?

EG Non pas du tout, même si j’ai toujours adoré son style. Moi je jouais tout ce qui me tombait sous l’oreille même du Madonna ou de la salsa (rires) Tu sais que Dug aussi est gaucher… rrrrrr… (soda) Je savais qu’Hendrix était gaucher mais c’est vraiment sa musique qui me branchait et je pense qu’en plus j’ai un style qui est différent du sien parce que... déjà... je ne suis pas Hendrix. (rires)

DP un trio de blacks qui compte deux gauchers, ain’t that craaaaazy man !

EG Yeaaaah that’s crazy Dug ! Va falloir qu’on tire parti de la situation man ! On en reparlera à la prochaine vidéo qu’on tourne.

Encore une fois ils se marrent comme des mômes.

Comment en êtes-vous arrivés à jouer de vos instruments respectifs ?

EG Moi, tous mes frères jouaient de quelque chose et particulièrement de la guitare. Ils étaient plus âgés que moi donc je les regardais faire et je m’imprégnais sans m’en rendre compte. Ils m’ont mis à la batterie et on jouait du Cream, Led Zep, Jeff Beck, Robin Trower, Franck Marino, mais aussi John Lee Hooker, Albert King, Wes Montgommery, Albert Lee, Roy Clarke, Chet Atkins, Jerry Reed. Donc j’écoutais tout ça et j’adore. Mais plus jeune, j’étais plein de curiosité et j’ai aussi écouté des choses plus « urban », du hip hop etc. Donc je suis un mélange de tout ça. Pour revenir, à ta question, un jour, tout petit, j’ai pris la guitare, j’ai commencé à jouer et j’ai trouvé ça facile, naturel. Alors j’ai dit à mes frères, ça c’est mon truc, c’est de la guitare que je veux jouer. Et ils ont arrêté la guitare (rires).

DP Alors moi j’ai commencé par la voix, j’allais à l’église, j’étais garçon de chœur et tout ce que j’entendais, je le chantais. Et je me suis aussi très vite rendu compte de l’effet qu’avait le chant sur les gens, je me souviens quà 10 ans j’ai fait pleurer des gens dans le public en chantant Blue Moon de Sinatra, c’était incroyable. Bref, je chantais tout le temps, quitte à agacer mes proches d’ailleurs. Je n’ai commencé la basse qu’à 23 ans mais je me souviens très bien que lorsque je pensais à un titre, la plupart du temps, c’état la ligne de basse qui me venait en tête. Dans les années 50, on écoutait ce qu’on pouvait hein, pas d’internet, pas de MP3, vers le fin des années 50 début des 60, j’avais des cousins qui rapportaient tous les week-end ce qui sortait chez Chess, ma grand-mère, elle, écoutait du gospel sans arrêt et j’avais d’autres cousins qui eux étaient très rock n’ roll. Donc, vers 14 ans, j’écoutais tout ça et je chantais dans la chorale de l’église. Par chance, il y avait dans ces chorales de grands chanteurs et c’était l’époque d’Aretha Franklin et de Stevie Wonder et tous ces chanteurs de l’église essayaient de les imiter. Moi, j’étais assis là et je voyais tous les adultes qui chantaient, criaient, dansaient dans tous les sens et je peux dire que c’est là que j’ai appris à chanter avec âme. Alors j’adore la basse, je n’arrêterai jamais d’en jouer mais je me considère d’abord comme un chanteur. A la basse mon son est ce qu’il est et je ne pense pas avoir quelque chose de spécial.

EG Non, non, man, ton son est vraiment spécial.

Je confirme… et vous Eric le chant ?

EG Pareil : on allait à l’église toute la nuit, des jours durant, je jouais de la gratte là-bas donc j’assistais à plein d’offices. Et comme disait Dug là tu touches vraiment le cœur du sujet, ce qui compte vraiment, l’âme. Respect man !

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On doit pas avoir les mêmes églises nous… (rires) Parlons matos, Eric tu as fait une vidéo pour la série Dunlop de pédales Hendrix. Tu vas être endorseur Dunlop ?

EG Non, non, je… rrrr… (soda), j’ai juste fait ça comme ça mais j’aime plein de trucs, Dunlop, Tech 21, TC Electronics… Côté amplis par contre, je ne joue quasiment que sur Two Rock. Et pour les guitares, bon je suis très Stratocaster like quelle que soit la marque, très simples bobinages, mais j’aime beaucoup de choses, je ne veux pas d’exclusivité sur ceci ou sur cela il y a trop de bons matériels partout pour se limiter.

Dug tu ne joues plus sur Hamer ?

Non ça fait un bail. Entretemps je suis passé chez Yamaha, Dean, re-Yamaha, ESP et maintenant Schecter, celle de la vidéo de Collateral Damage est une Model T Bass et j’ai une Diamond Series custom made qui ressemble à une Tele toute noire, elle est vraiment cool. Pour les micros je mets mon modèle de Seymour Duncan qu’ils ont arrêté de fabriquer depuis longtemps. J’en ai 5 que j’installe sur toutes mes basses à tour de rôle.

Tu utilises toujours un Ampeg SVT et un Marshall ?

DP Oui, mais maintenant j’utilise de plus en plus souvent l’Axe FX c’est plus simple pour des concerts ponctuels et tu peux faire ce que tu veux : si tu veux mettre deux SVT et deux Marshall, tu peux ; si tu veux changer le type de lampes de tes Ampeg tu peux, c’est très pratique.

Oui j’ai vu John Petrucci il l’utilise aussi…

EG Qui c’est John Petrucci ?

DP Le guitariste de Dream Theater

EG Ah… Ok.

DP Les gars de Deftones s’en servent aussi…

EG Et ça sonne bien ?

DP Franchement tu ne peux même pas faire la différence et ça tient dans ta valise.

Suit un petit cours de Dug à Eric sur les vertus de l’Axe FX.

EG Je l’utiliserais bien, ça a l’air intéressant, mais je suis vraiment attaché à mes bon vieux amplis et pédales, mais je vais peut-être aller voir ça sur le show tout à l’heure.

Et vous jouez là sur salon ?

DP Oui je fais des séances de signature surtout chez Ampeg, Schecter et quelques autres.

EG Ouais pareil et je joue un peu aussi chez Two Rock, Dunlop, Mojo Pedals, Seymour Duncan…

Un conseil aux débutants pour terminer ?

DP Suis ton cœur, ne te limite pas à un genre de musique, sois ouvert d’esprit et joue tout ce que tu peux, parce que tu plus tu copieras plus tu sonneras original à l’arrivée.

Eric ?

EG Pareil que Dug. Exactement. Ha, ha, ha !!!

Bon, merci beaucoup messieurs.

EG You’re welcome man !

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La seule photo (bien floue) de cette interview prise par... Ray Luzier batteur de Korn !!!

Portfolio

 

Mots-Clefs

Type d’article
Interview NAMM 2013
Musiciens/Groupes
Dug Pinnick Eric Gales
Numéro
GX55

 

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