On pourrait en faire un sujet d’étude pour école de commerce, tant la carrière de la Whammy fut gérée en dépit du bon sens : il y a dix ans Digitech sort le premier produit guitare à la fois innovant et éclatant depuis le Floyd Rose. Aussitôt, des tas de guitaristes (et de bassistes) l’adoptent et des gens comme Tom Morello lui donnent ses lettres de noblesse ce qui la hisse en très peu de temps au rang de classique. Suit la sortie d’une Whammy II, en plastique noir, moins glamour que le métal rouge Ferrari, qui malgré tout apporte quelques fonctions supplémentaires, donc on ne râle pas trop. Et puis soudain, sans crier gare, Digitech la retire carrément de son catalogue tout en intégrant son principe dans pas mal de ses appareils. Mais, rien à faire : la Whammy première manière garde une place à part dans l’imaginaire des guitaristes du monde entier, qui, année après année, font le siège de la firme américaine. Et ça marche ! La preuve...
Cette nouvelle Whammy est à première vue à la fois familière et légèrement différente. On retrouve sa divine robe rouge, sa solide structure métallique, un peu plus lourde peut-être, et surtout on remarque l’arrivée d’une prise MIDI In et de LED qui renseignent l’utilisateur sur le preset en cours ou la mise en service de l’effet. Digitech s’est, dixit l’argumentaire, astreint à recréer les sons et les performances exactes de la première Whammy (on ne fera pas de mauvais esprit en soulignant que ça n’a pas dû être trop dur de retrouver des archives à peine vieilles d’une dizaine d’années), alors qu’en est-il exactement ?
Heureuses retrouvailles
Les neufs presets d’harmonisation rappellent en tout point la Whammy originale et permettent tous de passer d’une harmonisation pédale relevée, à une autre pédale enfoncée, de l’octave inférieure à l’octave supérieure ou de la quarte inférieure à la quinte supérieure par ex. Tous les presets de cette section sont pensés pour être directement et facilement utilisables en scène même sans avoir étudié la fugue et le contrepoint pendant dix ans. On note déjà, sans que cela se montre trop gênant à ce stade, une certaine résistance de la pédale à revenir en position relevée dont nous verrons la cause tout à l’heure. La section Detune comporte deux presets que l’on peut (un peu vite je l’admets) qualifier de « chorus léger » et de chorus plus prononcé, la profondeur de chacun se réglant à la pédale ; le plus light des deux (Shallow) est particulièrement flatteur sur son clair. Bien qu’on n’achète pas une Whammy pour cette section, on est parfois bien content de la trouver et elle constitue un bonus appréciable.
Nous arrivons maintenant à la partie Whammy proprement dite qui agit comme un pitch shifter à hauteur réglable en temps réel. Avec les quatre premiers presets, on peut se balader à plus ou moins une ou deux octaves, vient ensuite un preset Dive Bomb, sorte de Floyd Rose virtuel très convaincant et un Drop Tune pour glisser d’un ton à la mode country. S’il n’y a que des compliments à faire sur les presets eux-mêmes, on est forcé d’émettre des réserves sur le pédalier. En réalité ça n’est pas très grave mais c’est un peu ahurissant de la part d’une marque d’aussi bonne réputation que Digitech. A l’arrière du pédalier se trouvent deux rondelles plastiques censées amortir le contact avec la base de la pédale. Or elles sont trop épaisses, résultat, en mode Whammy on ne revient pas à la hauteur d’origine mais facilement un demi-ton voir un ton au-dessus et forcément on joue faux. Heureusement ces deux rondelles sont faciles à enlever ; ensuite tout rentre dans l’ordre mais quand même...
A part ce détail, la Whammy n’a rien perdu de sa superbe ni de son potentiel créatif et on arrive toujours à lui trouver un emploi qui n’était pas prévu par le manuel ce qui est la marque des très grands effets.