Un beau matin sortant de chez lui, Thomas, ci-devant vendeur chez Rythmic Music à Osny détecte un gros étui près des poubelles d’un immeuble. Ca tombe bien parce qu’il cherche justement un étui pour un clavier et que celui-ci a l’air d’avoir les bonnes proportions même s’il n’est pas de première fraîcheur. Il s’approche et quelle n’est pas sa surprise, lorsqu’il l’ouvre, de découvrir, outre une nauséabonde odeur de renfermé, une Washburn Culprit 2003, guitare designée et arborée par Dimebag Darrell du temps où il était chez Washburn. Alors bien sûr, c’est la version coréenne de la bête et ce qu’on pouvait deviner au vu de l’étui se confirme : la guitare est dans un sale état. Pragmatique et travaillant dans un magasin de musique situé en premier étage, Thomas fixe la guitare sur un mannequin qui indique la présence du magasin depuis le rez-de-chaussée et cette Culprit aurait donc pu, à l’instar de certaines Flyin V de 58, terminer sa carrière comme enseigne d’un magasin de musique.
- Tout est dans les détails
Facebook power !
Mais le destin veille au grain, et v’là-t-y pas que Michel Lâg s’en vient un beau jour à Osny pour l’une de ses célèbres journées Lâg. Comme à son habitude, il poste moult photos de l’événement sur Facebook, dont une du mannequin. Le sang du Judge ne fait qu’un tour, d’autant qu’il a testé la Culprit à sa sortie, en 2003, et en garde un souvenir ému. Coup de fil au magasin, Thomas lui explique que bon, la guitare n’est pas vraiment opérationnelle mais que si le Judge se sent de la remettre en selle, il n’a qu’à venir la chercher. Ce que je fais bien sûr et voici donc un premier gros merci à Thomas de Rythmic Music.
Suit une période pendant laquelle le Judge balance entre restauration et customisation. Puis ayant choisi la seconde il parle autour de lui de son projet et c’est là que trois autre personnes entrent en jeu. La première est un passionné de guitare qui met un JB Seymour Duncan de 1985 (et pas n’importe quoi un JBJ, donc fabriqué par Maricela Juarez, qui maintenant dirige plus ou moins le Custom Shop de la marque) sur la table, en disant : « Tiens ça pourra toujours te servir. ». Puis entrent en scène deux potes qui fabriquent des guitares, à qui Judge demande où il pourrait trouver un Floyd genre stock B, un bradé parce qu’il aurait un défaut dans les chromes ou quelque chose du genre. « Tu rigoles, tiens on en a un qui traîne là, on n’a pas de demande pour des Floyd en ce moment, et pis prend aussi le sillet à blocage, les inserts et les ressorts va ! ». Et voilà comment le Judge s’est retrouvé avec tous les ingrédients nécessaires à sa customisation. Merci à ces trois bonnes fées.
- Reno kiffe la Judge X Wild
Wild Custom à la rescousse !
Ne restait plus qu’à trouver les bonnes personnes pour customiser cette gratte déjà pas ordinaire. Ca faisait longtemps que j’avais envie de faire un truc avec Wild. On avait plusieurs fois évoqué le sujet, mais là c’était l’occase rêvée ! Le Judge contacte donc Reno, Julien et Blaise qui se montrent très enthousiastes. Récupération du bestiau à Guitares au Beffroi et direction Vichy dans l’antre des Wild boys.
Côté bois tout va presque bien, et encore, Julien sera obligé de rattraper le manche qui commence à vriller, mais pour ce qui est du reste, on peut juste sauver les mécaniques Grover d’origine : le Floyd est à jeter, présentant même un pontet de strat sur la grosse corde Mi (wtf ! comme on dit de nos jours), ses pivots et leurs inserts sont bons pour la poubelle ; il faut aussi changer le sillet bloque-cordes, les frettes sont rouillées, mais sauvables, l’électronique est dévastée, bref Julien va déjà faire tout un travail de remise en état de la guitare qui, de plus, n’a pas vu de jeu de cordes depuis… on ne sait pas vraiment quand mais ça se compte au moins en mois sinon en années. Et là, force est de rendre hommage à son travail car, quand j’ai eu la gratte entre les mains, c’était une vraie formule 1.
Mais et la custo ? me direz-vous. On y vient. Ceux qui me connaissent savent mon amour des guitares mono micro. On est donc parti sur cette base mais, du coup, il fallait cacher la défonce du micro grave et tant qu’on y était, virer le pickguard miroir d’origine. Là c’est Reno qui s’y est collé, je lui ai laissé carte blanche et le résultat fut à la hauteur de mes espérances. Une grosse plaque gravée reprenant les motifs ésotériques chers à l’équipe qui couvre tout l’avant du corps avec, juste au-dessus du micro le nom de la guitare « Judge X Wild » et une autre sur l’aile arborant le logo de Cour Supreme (qui est l’œuvre du même Reno d’ailleurs). Pour être tout à fait classieux, le cache trussrod est lui aussi gravé d’un beau « Judge ».
- Modèle Clara Deswartes - Photo olivier Parent
A star is reborn
Résumons-nous : vous confiez à Wild une guitare trouvée aux ordures et ils vous rendent un avion ! J’ai utilisé la Judge X Wild sur scène, une semaine après l’avoir récupérée, à la fête de la musique d’Auxerre, et ensuite au Megève Blues Festival, elle tue ! Le JB sonne la mort, c’est puissant précis, plein de viande. Le Floyd m’a renvoyé direct dans les années 80, effet backtouzefiouchâh garanti, dive bombs spaghettis, notes qui grelottent, hennissements de cheval, le tout avec un confort de jeu impressionnant. Cette gratte est juste sublime, seul inconvénient t’es obligé de nettoyer la bave des spectateurs du premier rang sur tes pompes, mais on s’y fait.
L’interview de La Chaîne Guitare (Pierre Journel)>
La Judge X-Wild dans le clip Big Zulu par Cour Supreme