Grover Jackson, c’est 40 ans de vie dédiés à la guitare électrique, des guitares mythiques créées pour les plus grands bref, une expérience monstrueuse dont les plus grandes marques ricaines ont bénéficié à un moment ou un autre. Dave Friedman a donc décidé de lui confier la réalisation des guitares qu’il avait en tête. Comme pour ses amplis, l’ami Friedman est parti d’une base connue et reconnue, changeant ceci ou cela, améliorant, customisant, bref faisant des choix affirmés sans jamais perdre de vue ce qui faisait la personnalité de l’inspiratrice. Son choix s’est porté sur la Tele, LA solidbody par excellence, celle par qui tout a débuté. La gamme comporte pour l’instant 22 modèles mixant trois bois différents pour le corps (aulne, acajou, pin à sucre), trois types de micros (doubles, doubles stacks et P90) etc. la guitare testée ici est la Vintage-T ARBWH.
Okéhouatizite ?
Ben, une Tele donc, au corps en aulne, avec un pickguard blanc perlé dont la forme est inspirée des Tele Deluxe, recouverte d’un vernis nitro reliqué avec discrétion et goût. On note un chanfrein stomacal comparable à celui d’une strat, seule grosse différence avec le corps de Tele original. Fixé en 4 points, avec une plaque libellée Friedman, le manche érable reçoit une touche palissandre et se termine par une tête six en ligne assez standard comportant une dépression sur laquelle on retrouve une plaque plexiglas dorée au nom de Friedman. Son dos est satiné sur la partie où officie la main gauche, comme si on l’avait joué de nombreuses années et que cela avait usé le vernis, qui est beaucoup plus épais derrière la tête et vers le talon. Cela procure une très bonne glisse et beaucoup de confort. Les 22 frettes, plus épaisses que sur le modèle, ont été pleckées pour un résultat parfait sous les doigts. Le sillet donne lui aussi dans la modernité puisqu’il est en TusQ blanc, préservant un look vintage tout comme les mécaniques de type Kluson et le cordier Hardtail avec chargement des cordes par l’arrière mais six pontets individuels. On le voit, l’idée directrice est d’améliorer une guitare légendaire en la dotant d’atouts modernes et éprouvés, sans la dénaturer. C’est pourquoi on ne va pas trouver de contourage du talon, de mécaniques à blocage ou de straplocks sur cette Vintage T. On reste roots autant que faire se peut.
En revanche, côté électronique, Friedman colle beaucoup moins au modèle, puisqu’on a deux Classic Humbucker Friedman routés, comme sur une Gibson, via deux volumes, deux tonalités et un sélecteur 3 positions. Les potards sont signés CTS et les capas sont des Orange Drop, bref que du bon.
Sahoundzes
La guitare se montre déjà très sonore à vide, avec beaucoup de brillance et de sustain naturel. Elle se joue avec plaisir même sans être branchée, tient bien l’accord et vibre bien. L’action est tout à fait correcte, et on constate que, sans surprise l’ensemble se comporte comme une Tele : faut lui rentrer un peu dans le lard, les aficionados ne seront pas dépaysés. Branchons !
Les sons clairs sonnent très beau, sur le grave et la position inter. Par contre, il faudra baisser un peu le volume sur le bridge qui a tendance à cruncher très vite. Les qualités sonores de l’instrument permettent avec des réglages ampli appropriés de jouer des parties très folk comme sur une guitare sèche. Le double grave sait se montrer très moelleux, limite Fender, en plus charpenté et on peut se taper du Hendrix façon Little Wing sans aucun problème. En position intermédiaire, le mix des deux micros se montre équilibré et très exploitable. L’aigu sonne bien entendu plus brillant plus agressif.
En son crunch, la guitare montre vite beaucoup de caractère, avec des attaques précises, un côté à la fois rauque et organique sur le micro aigu, beaucoup de rondeur sur le grave. Elle produit des crunchs très ricains, et si vous aimez King’s X, vous aurez l’arme parfaite, alliant la corpulence des doubles et le côté plus fin, plus perçant de la lutherie, c’est carrément royal.
En saturax, les harmoniques sifflées fusent, la compression entre en scène de manière naturelle et équilibrée. Les sons sont pleins, juteux, compacts et aident au jeu. On y passerait des heures. Le micro grave passe aussi très bien en saturé car il évite le côté brouillon de certains doubles manche. Il possède un caractère power blues à la Gary Moore très gratifiant, on s’y croirait. On pousse, on pousse et on se retrouve à larséner avec jouissance, musicalité et toujours beaucoup de tenue dans les graves même s’ils sont bien profonds, notamment en drop D.
Bref cette Vintage T est un vrai feu d’artifice sonore.
Pinaïntize
J’ai également pu poser les mains et les oreilles sur une version corps acajou équipée de P90 louchant donc vers la LP Special. Là encore, on se retrouve aux commandes d’une machine à rock bien roots et très efficace pour taper dans le classic rock ricain. La guitare fait merveille en crunch, se montre superbe en son clair et tient bien la saturation même forte. Guitare étonnante et percutante qui permet de passer en un clin d’œil d’un son claquant à une grosse satu bien compressée.
Ces Vintage T Friedman sont d’incontestables réussites ; leur prix peut paraitre élevé mais n’oublions pas que nous avons affaire à du made in USA. De plus, encore une fois, Friedman propose quelque chose qui tout en se réclamant de la tradition et des racines de la guitare électrique, possède une personnalité affirmée et se ballade avec aisance sur une palanquée de styles différents..
Bon ok, celle-ci a un tremolo, mais le morceau de démo valait vraiment le coup