Dans ces cas-là, c’est tout l’un ou tout l’autre, mais dans ce cas précis c’était plutôt tout bon. Le corps de Karol’ in, de forme originale, en acajou d’Afrique, est entouré d’un binding en ivoire qui ceint également la tête. Le manche, en érable ondé, reçoit une touche en ébène avec repérage de la 12ème case en zirconium, hommage à Danny Gatton. La jonction corps/manche s’effectue à la vingtième case sur vingt-deux, avec une légère dépression à l’arrière pour faciliter le jeu en aigu. On note aussi et dans le désordre : un chanfrein stomacal de confort, six Spertzel autobloquantes, un chevalet cordier en ébène, des potards et un capuchon de sélecteur exclusifs en palissandre des Indes des pontets graphites et des plaques arrières en alu brossé.
Mais bien sûr, la spécificité de cette guitare vient de son revêtement en galuchat (du nom de son premier utilisateur Jean Paul Galuchat en 1742), dont les aficionados de Thalassa savent qu’il s’agit ni plus ni moins de la peau de la raie. Cette peau, dure quand elle est sèche et qu’on mouille pour pouvoir la travailler, est recouverte de spicules, sortes de protubérances de taille variable composées de dentine (la même matière que nos dents donc). La couverture de la guitare a nécessité neuf peaux, elles sont abrasées, les ronds que vous voyez sont les spicules "décalottés" en quelque sorte, puis teintées.
Les micros sont les trois simples G&L qui équipent les Legacy de la marque, obtenus à titre exceptionnel grâce aux bons offices d’IML. L’électronique de type stratocaster avec volume et deux tonalités ainsi qu’un sélecteur cinq positions. Petit bonus, l’une des tonalités se tire, donnant, sur la quatrième position, les micros aigus et mid plus le grave en parallèle, sur la cinquième, les trois micros en série. Outre son originalité, la Karol’ in a su se faire apprécier par son confort de jeu même si le profil du manche était un peu trop épais pour moi (mais c’est affaire de goût) et par ses sonorités authentiques et variés.
Cette guitare a demandé beaucoup de travail et doit être considérée comme une vitrine, une démonstration de savoir-faire. Rien ne vous oblige à prendre le "All Kit", tout est modulable. Emmanuel Mignot vise le sur mesure pour musiciens exigeants mais est ouvert à toute autre proposition, séries limitées pour les marques intéressées, collaboration avec d’autres luthiers, customisations d’instruments existants etc.